CATCHAT

Le chat ... Rien que Chat ! ... Enfin presk !

Accueil > ACTUALITE > Les Poules Traitees Comme Des Moins-Que-Chien

Les Poules Traitees Comme Des Moins-Que-Chien

dimanche 27 juillet 2003, par CatChat

La « zoolâtrie » française gagne sur le domaine juridique. Les animaux de compagnie , auxquels on reconnaît une valeur sentimentale, s’affranchissent peu à peu de leur statut de « chose ».

Le philosophe australien Peter Singer (qui fut à l’origine du mouvement planétaire de défense des « droits des animaux ») avoue n’avoir jamais aimé les bêtes. Rien de plus égarant pour un moraliste que la partialité dans laquelle l’amour nous jette. Cette position éthique a déterminé, dans une large mesure, sa manière de problématiser la question animale. Les chiens, les chats et les autres bêtes que l’on aime, considérés comme une sorte d’aristocratie, ne retiennent pas une seconde son attention. Ses soucis se portent sur les grandes masses de porcs, veaux, volailles, kangourous et sin ges exterminés et torturés chaque jour dans les laboratoires de recherche et les fermes-usines pour la satisfaction de nécessités humaines souvent bien futiles.

Mais Peter Singer n’est pas le seul à mépriser les animaux de compagnie. D’autres, moins révolutionnaires, moins savants aussi, accusent leurs propriétaires d’oublier les masses humaines souffrantes au plan international, ainsi que les « vrais » problèmes qui traversent le pays, et déplorent dans cet amour le symptôme de la solitude et de la perversité de notre monde. Comme si le fait de laisser mourir de faim son chien ou de ne pas vacciner son chat pouvait bénéficier aux enfants irakiens, diminuer le nombre de licenciements ou infléchir le taux de suicides.

Chiens saisissables. Pourtant, cette population dégénérée est majoritaire en France où l’on compte 42 millions d’animaux de compagnie distribués dans plus d’un foyer sur deux. S’il est vrai que le nombre n’est pas en lui-même garantie de bonne morale, comme le prouve le résultat de certains suffrages, il n’empêche que les détracteurs de cette « zoolâtrie » sont de plus en plus vaincus par l’évolution de nos lois. Ainsi, par exemple, si jamais vous n’avez pas réussi à payer vos dettes, l’huissier ne pourra pas saisir votre chat ou votre chien et le vendre aux enchères, parce que le droit lui reconnaît une valeur sentimentale. Mais le fait d’avoir exclu certains types de chiens de cette protection a conduit certains auteurs amis des bêtes à se demander avec stupeur « dans quelle froide et inhumaine cervelle de technocrate a pu germer cette idée incroyable qu’il fallait déclarer saisissables certains chiens comme s’il s’agissait du premier objet venu ? » D’au tres n’ont pas hésité à qualifier ce type de saisie de « prise en otage d’un être aimé », l’huissier devenant un vulgaire ravisseur. On peut donc penser que ce mouvement va s’amplifiant.

Il est certain que comparé à la souffrance du prolétariat animal, ces petites injustices semblent bien anodines. Les poules, par exemple, sont entassées à trois ou à quatre dans des cages plus petites que la surface d’une seule page de journal. Afin de réduire le coût du nettoyage, le sol est en grillage, inadapté à leurs pattes, incliné, pour que les oeufs se rassemblent sur un côté, rendant ainsi la récolte plus facile, mais les empêchant de se reposer à leur aise. Dans ces conditions, elles ne sont en mesure de satisfaire aucun de leurs instincts naturels ; ni étendre complètement leurs ailes, ni marcher librement, ni se baigner dans la poussière, ni gratter la terre, ni construire un nid. Ces conditions de vie les amènent à s’entre-tuer à coup de bec. Néanmoins, à l’heure de faire nos courses, nous avons du mal à payer plus cher pour acheter des oeufs qui ne sont pas le produit de cette cruauté.

Travail de l’amour. En revanche, le sort des animaux domestiques a ému au point que, au terme d’une longue évolution juridi que, ceux-ci ont acquis un statut particulièrement troublant, où la frontière de la chose et de la personne est bien difficile à tracer, sortes de chimères, plus tout à fait animales, pas tout à fait humaines. Cette évolution n’a pas suivi les postulats moraux de Singer. C’est la protection de l’amour des humains à l’égard des animaux de compagnie qui a été le moteur de cette véritable révolution dans leur statut juridique. Travail têtu de l’amour sur nos institutions. Les histoires qu’on va lire montrent comment les tribunaux sont devenus le théâtre de ces passions ardentes qui ont changé les bêtes de choses inanimées en personnes (avec certes, des droits moindres que ceux des personnes humaines), de créatures sans valeur en amis précieux, sans qui toute possibilité de bonheur semble décidément impossible.

MARCELA IACUB

Chercheur au CNRS, dernier livre paru : « Qu’avez-vous fait de la révolution sexuelle ? », Flammarion, 2002.

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions’inscriremot de passe oublié ?