CATCHAT

Le chat ... Rien que Chat ! ... Enfin presk !

Accueil > ACTUALITE > Anthropomorphisme

Anthropomorphisme

lundi 13 mai 2002, par CatChat

Docteur en anthropologie et ethnologie, Jacqueline Milliet est une spécialiste de la domestication animale. Entretien sur l’évolution de notre rapport aux animaux.

Les animaux domestiques ont leur écuelle Gucci, des manteaux de marque, ils sont nos confidents, ils nous protègent, ils bénéficient d’une médecine de pointe et ils sont dépressifs comme nous. Ne sommes-nous pas en train d’en faire des hommes ?
D’abord, nous prêtons des intentions aux animaux. C’est indéniable, mais ce n’est pas propre à notre culture : toutes projettent un certain nombre de valeurs, de capacités plus ou moins magiques sur les bêtes. Plus que le phénomène lui-même, c’est donc ce que nous projetons sur les chiens et les chats qui est révélateur. Notre société prête des sentiments à l’animal domestique, qui peut prétendument nous comprendre, compatir, s’inquiéter, s’attrister… En cela, je reconnais bien l’importance que nous accordons à tout ce qui est de l’émotionnel pur, au détriment du rationnel.
Ensuite, il y a cette façon de traiter l’animal comme s’il était l’égal de l’homme, en lui donnant les mêmes biens et les mêmes droits. Gommer toute hiérarchie entre le chien et l’être humain est sans doute un moyen pour nous d’expier l’utilisation abusive de certaines espèces animales, et agit donc comme une sorte de rédemption. Néanmoins, cet anti-spécisme est anxiogène. Ne plus mettre de barrière entre le monde naturel et le culturel, qui est le propre de l’homme, est dangereux.

Notre rapport à l’animal domestique a-t-il toujours été le même ?

Il s’est transformé, c’est sûr. Le tournant majeur remonte à l’industrialisation, qui marque la spécialisation du travail, autant pour les humains que pour les animaux. Jusque-là, on utilisait la même vache pour le lait et la viande, le cheval tirait la charrue et se mangeait, le mouton donnait son petit et sa laine. A partir du XIXe siècle, on commence à sélectionner dans les campagnes des vaches à viande, des laitières, etc. On a créé des « spécialistes ». Parallèlement, les animaux de travail disparaissent en ville, où l’on ne trouve plus que des animaux de compagnie.

Concrètement, qu’est-ce qui a changé ?

On a d’une part idolâtré certains animaux comme les chats et les chiens, ceux qui en fait n’ont plus de fonction précise et vivent dans la maison. C’est au XIXe siècle déjà que sont apparus les toilettages de luxe, les toupets à la queue des caniches, les sélections pour que le chiot ressemble au petit de l’homme et qu’on puisse le bichonner. On a d’autre part hyperexploité et rentabilisé les autres animaux, ceux qui ont été développés pour une fonction particulière. On a ainsi commencé à les sélectionner, les élever, les transporter de façon scandaleuse. L’homme a depuis lors un comportement très peu cohérent envers le monde animal. Il peut dans le même temps organiser une cérémonie d’enterrement pour son chat et élever des poules en batterie…

Vous êtes parfois assez dure avec les associations de protection des animaux…

« Mieux je connais les hommes, plus j’aime mon chien » est le genre de phrases que les « amis des animaux » prononcent volontiers… Plus sérieusement, j’ai conduit une étude sur les valeurs véhiculées par nombre de ces associations, et sans tomber dans la caricature, on constate qu’elles sont proches des valeurs défendues par l’extrême droite. Les rapports de Brigitte Bardot et de Jean-Marie Le Pen sont assez représentatifs. Cela ne signifie pas que tous les propriétaires de bergers allemands rêvent de les lâcher sur les étrangers. Simplement, certains ne se sentent pas bien dans cette société en mal de repères, et la désertent en se réfugiant sur leurs possessions (eux, leur maison, leur chien), qu’ils défendent contre le monde extérieur, perçu comme menaçant. D’où des dérives possibles, notamment l’antisémitisme et la xénophobie


Source : l’Hebdo

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions’inscriremot de passe oublié ?